De l’état d’urgence à l’état d’urgence sanitaire : éléments de comparaison - Centre de Recherche en Droit Antoine Favre
Article Dans Une Revue Revue pénitentiaire et de droit pénal Année : 2020

De l’état d’urgence à l’état d’urgence sanitaire : éléments de comparaison

Résumé

Le 24 mars dernier était promulguée la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face l'épidémie de covid-19 1 avec pour objectif « d'intégrer dans la loi (…) l'organisation qui a été mise en place dans l'urgence pour permettre un éclairage scientifique des décisions publiques ainsi que leur transparence vis-à-vis tant de la représentation nationale que de la population » 2 . Le souvenir de l'état d'urgence est encore vif : faisant face à une vague d'attentats terroristes, la France sortait à peine de la plus longue période sous ce régime d'exception, depuis la guerre d'Algérie. L'état d'urgence en devient presque une -mauvaise -habitude.

Les hypothèses de nature à perturber les institutions sont multiples et présentent des degrés de gravité divers 3 . La Constitution prévoit ainsi des situations de crise particulièrement graves dont la gestion est assurée par le Gouvernement (état de siège prévue par l'article 36 4 ), ou directement par le Président de la République (pouvoirs exceptionnels de l'article 16) 5 . En outre, le Gouvernement a compétence, pour gérer une crise, par le biais de prérogatives exceptionnelles de puissance publique qu'il peut tirer de principes jurisprudentiels (théories de l'urgence, des circonstances exceptionnelles) ou encore de la loi (état d'urgence, par exemple). S'agissant des effets, d'évidents points de convergence apparaissent : ces régimes d'exception emportent le plus souvent un transfert de compétence, des pouvoirs de police accrus et, surtout, une justification des atteintes momentanées aux libertés individuelles et collectives. L'état d'urgence (L. du 3 avril 1955) et l'état d'urgence sanitaire (L. du 23 mars 2020) n'échappent pas à ce constat, bien au contraire.

Afin de gérer les conséquences de l'épidémie de covid-19 et malgré quelques voix critiques, les premières mesures prises par le gouvernement reposaient principalement sur le pouvoir de police générale du Premier ministre 6 , se combinant avec la théorie des circonstances exceptionnelles 7 , et sur l'article L. 3131-1 du Code de la santé publique permettant au Ministre chargé de la santé de prendre, dans l'urgence, en cas de menace sanitaire grave, notamment en cas d'épidémie, toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu, afin de limiter les conséquences sur la santé de la population, comme ce fut le cas, par exemple, lors de la gestion en 2009, de l'épidémie de la grippe A -H1 N1 8 . Pour autant, le gouvernement a estimé que ces fondements, il est vrai critiqués par de nombreux auteurs, étaient trop fragiles -au regard de l'intensité des atteintes portées aux libertés

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hal-04849052 , version 1 (19-12-2024)

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Citer

Jean-François Dreuille. De l’état d’urgence à l’état d’urgence sanitaire : éléments de comparaison. Revue pénitentiaire et de droit pénal, 2020, pp.287-302. ⟨10.4000/revdh.9066⟩. ⟨hal-04849052⟩
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