La population vieillissante actuelle aura plus que doublé entre 2020 et 2050, alors que les plus âgés (les 80 ans et plus) devraient être cinq fois plus nombreux à l’issue de cette même période. Les problématiques liées au vieillissement sont progressivement devenues des défis sociétaux majeurs, que ce soit sur le plan clinique, économique, politique et de santé publique. Dans ce contexte, bien vieillir est devenu un enjeu crucial pour les sociétés modernes. L'objectif de cette thèse était 1) d'une part, l’étude théorique du concept de vieillissement réussi dans une perspective d’application sur données de cohortes épidémiologiques populationnelles et dans le cadre d’intervention en santé publique; et 2) d'autre part, de mieux décrire le continuum de dépendance, en explorant plus particulièrement la phase précoce du processus : la question posée en toile de fond étant de déterminer si la fragilité pourrait avoir une place dans le processus continu de dépendance.Nous avons tout d'abord réalisé une revue de la littérature permettant d’étudier le concept de vieillissement réussi et d’en comparer les différentes approches. Trois grandes approches peuvent être distinguées : la plus classique et la plus ancienne, l’approche biomédicale, celle incluant des facteurs psychosociaux et environnementaux et enfin celle basée sur le point de vue subjectif personnel de l’individu vieillissant. Sur les 1057 articles initialement sélectionnés, 43 articles ont été retenus. Les résultats ont confirmé que le vieillissement réussi était un processus multidimensionnel profondément hétérogène et interdépendant, avec une variabilité substantielle des expériences individuelles vécues par une personne âgée. Une définition optimale devrait combiner des marqueurs de la capacité fonctionnelle, des facteurs psychosociaux, mais aussi des évaluations subjectives de son vieillissement, propres à chaque individu. Dans l'histoire naturelle de la dépendance, la perte d'une fonction précède souvent la perte d’autres, selon un ordre souvent hiérarchisé. Cette relation hiérarchique a été identifiée dans de précédents travaux entre les domaines de dépendance [mobilité, Activités instrumentés de la vie quotidienne (AIVQ) et Activités de base (AVQ)]. Dans la continuité de ces recherches, nous avons poursuivi cette approche en nous intéressant plus particulièrement aux stades plus précoces du processus. Nous sommes ainsi partis de l’hypothèse selon laquelle la fragilité faisait partie de l'histoire naturelle du processus de dépendance et qu’elle avait sa place en amont de ce continuum. Sur les données de la cohorte populationnelle 3Cités (3C), nous avons défini un indicateur hiérarchisé allant de la robustesse à la dépendance sévère, en passant par la fragilité physique et la dépendance modérée. Afin de valider la pertinence de cette approche, nous avons étudié les risques de décès à 4 ans associés à cet indicateur hiérarchisé. Les résultats confirment l’intérêt d’introduire la fragilité pour décrire l'ensemble du processus de dépendance chez les personnes âgées vivant à domicile. Enfin dans la continuité de ce travail, ces résultats ont été confirmés sur une seconde cohorte populationnelle : la cohorte AMI. De plus, afin d’affiner encore l’analyse de la phase précoce du processus de dépendance, l’état de pré-fragilité a été distingué de l’état de robustesse. Ces travaux, menés sur 3C et AMI (données fusionnées offrant une taille d’échantillon plus conséquente), confirment que les sujets pré-fragiles ont bien un risque significativement accru de décès par rapport aux robustes et un risque moindre par rapport aux autres états analysés. Enfin, dans une démarche plus interventionnelle, nous avons construit un programme (SoBeezy) visant à promouvoir le bien-vieillir à l’aide d’une plateforme numérique ayant pour principe l’entraide citoyenne.