The emergence of neuroeconomics
L'émergence d'un nouveau domaine de savoir: la neuroéconomie
Résumé
Neuroeconomics is an interdisciplinarity field that has appeared in the beginnings of 2000's. This thesis proposes a theoretical history of neuroeconomics. The emergence of neuroeconomics is understood as being the continuation of an older experimental research program, that starts in 1961 with Richard Herrnstein's pioneering works. This quantitative psychology of motivation (called here "neo-behaviorism") focuses on the study of matching behaviors. The development of neo-behaviorism leads in the 1990's to a concept that has played a prominent role in neuroeconomics: the notion of reward learning. This historical analysis serves first theoretical purposes. The framework of reward learning allows to specify neuroeconomics from other approaches, in particular from the psychological works of Daniel Kahneman. One of the main result of the thesis concerns the distinction between the evolutionist and sequential perspective of neuroeconomics from the kahnemanian perspective in behavioral economics. At another level, the aim of thesis is to explain the emergence of the discipline in the 2000's. It is significant to notice that the experimental results obtained in the 1990's aroused economists' interest only in 2002-2003, precisely at the time when started a heated debate about libertarian paternalism and "behavioral" welfare policies. I argue that neuroeconomics allowed to solve normative problems that were raised by these discussions within behavioral economics. Neuroscience is indeed implicitly influenced by medical concerns; neuroscientific definition of irrationality is therefore justified at a normative level by clinical criteria used to diagnose pathologies. Neuroeconomics is hence understood as a an economic regulation of mental disease. This "economic psychiatry" is conceptualized in reference to what Georges Canguillhem calls an "scientific ideology".
La neuroéconomie est un nouveau sous-domaine de l'analyse économique. Elle est apparue au début des années 2000, à la faveur d'un rapprochement entre économie et neurosciences. Cette thèse propose une histoire théorique de la discipline. L'émergence de la neuroéconomie est d'abord située dans le prolongement d'un courant de recherches expérimentales, qui débute en 1961 avec les premières contributions de Richard Herrnstein. Cette psychologie quantitative de la motivation, appelée ici néo-comportementalisme, étudie les comportements dits de matching ou d'égalisation des rendements. Dans les années 1990, cette approche aboutit à développer un concept central pour la neuroéconomie: la notion d'apprentissage de la récompense (reward learning). Cette étude historique sert d'abord des fins de clarification théorique. Le cadre théorique du reward learning permet de spécifier la neuroéconomie d'autres approches, en particulier les travaux en psychologie de Daniel Kahenman. Le premier résultat important de cette thèse concerne ainsi l'affirmation d'une distinction entre la perspective évolutionniste et séquentielle de la neuroéconomie de l'économie comportementale d'inspiration kahnemanienne. A un deuxième niveau, il s'agit de rendre raison de l'apparition de la discipline au début des années 2000. Il est significatif de constater que les résultats expérimentaux obtenus dès les années 1990 ne commencent à susciter l'intérêt des économistes qu'en 2002-2003, précisément au moment où apparaît en économie comportementale un débat autour du paternalisme libertarien, et de la régulation dite " comportementale " des conduites irrationnelles. Je défends l'idée selon laquelle la neuroéconomie a permis de résoudre certains problèmes normatifs posés par ces discussions au sein des behavioral economics. Par leur ancrage médical, les neurosciences justifient l'adoption de définitions normatives de l'irrationalité, à l'appui des critères cliniques utilisés pour diagnostiquer des pathologies. La neuroéconomie est ainsi saisie comme un projet de régulation économique des troubles mentaux. Cette " psychiatrie économique " est comprise comme ce que Georges Canguilhem appelle une " idéologie scientifique ".
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