Cette recherche intitulée : « pressions humaines et stratégies de gestion durable des formations de mangrove de Tiko (sud-ouest Cameroun)», vise à analyser si les pressions sociales qui s’exercent actuellement sur la mangrove répondent aux principes de gestion durable des forêts. La recherche se fonde sur une démarche hypothético-déductive, et s’appuie sur la collecte des données de sources secondaires dans les bibliothèques de référence et les sites internet. En ce qui concerne les données de sources primaires, les entretiens et focus groups précèdent l’étape du questionnaire d’enquête qui est administré à 861 ménages répartis dans 37 quartiers et campements. Pour une étude écologique de la mangrove, les relevés botaniques sont effectués dans trois transects perpendiculaires établis respectivement au sein d’un faciès de mangrove dense, moyennement perturbé et dégradé. Au-delà des observations de terrain, l’étude fait recours à l’analyse diachronique des images Landsat des années 1976, 1986, 1996, 2006 et 2016 pour apprécier l’évolution de l’occupation des sols de Tiko. L’analyse et le traitement des données laissent entrevoir 5 principaux résultats. Le couvert est constitué de deux composantes majeures des genres Rhizophora et avicennia, et d’une composante mineure du genre Nypa. Tiko qui est occupée depuis le début du 18e siècle, regroupe 18 groupes ethniques camerounais et 15 groupes ethniques étrangers. Le pourtour de Tiko fait une surface de 529,3 km², soit 387,15 km² de mangrove et 142,15 km² représentant l’étendue constituée partiellement de surfaces agricoles et d’un espace étroit pour le bâti. La faible mise en pratique des législations de gestion durable de la mangrove, et la logique d’acteurs locaux, favorisent l’occupation et l’exploitation de la mangrove pour les besoins socio-économiques. Les constructions et l’exploitation des palétuviers constituent les principales activités qui favorisent la dégradation de la mangrove. Dans la zone périurbaine, une surface terrière de 4,13 m²/ha/an correspondant à 26280 palétuviers rouges de 47,77 cm de diamètre, est exploitée pour un revenu de 2 233 800 000 FCFA. Dans les campements, une surface annuelle de 21,92 m²/ha est exploitée par 101 équipes de femmes et d’enfants, et 20 groupes d’hommes. Cette collecte à la fois des tiges de 12,73 cm de diamètre et d’arbres de 44,50 cm de diamètre correspond à une valeur économique totale de 4 364 000 000 FCFA. Dans les campements, une surface annuelle de 20,92m²/ha exploitée est utilisée pour le fumage qui constitue la principale activité consommatrice de la mangrove. L’étude relève une perte de 17,3 km² de mangrove en quatre décennies, ainsi qu’une augmentation du couvert considérablement dégradé qui progresse de 8 km² entre 1976-1986, à 122,45 km² en 2016. La dégradation de la mangrove entraîne des dégâts considérables sur la population riveraine. L’étude relève 49 pertes en vies humaines, et les destructions de 201 biens électroniques, 339 patrimoines vestimentaires, 74 ressources halieutiques et 144 documents en 2016. L’étude relève également une dépense totale de 39 208 500 FCFA pour remédier aux dégâts, et un montant de 38 935 000 FCFA correspondant aux pertes enregistrées dans 35 campements. La mangrove joue un rôle de barrière qui est inéluctable. Dans les sites exposés, le coût des dépenses est de 15 785 000 FCFA, contrairement aux sites protégés où le coût des dépenses est de 2 938 000 FCFA. La population locale est détentrice des solutions pour remédier aux pressions humaines sur la mangrove et aux effets négatifs y relatifs. En plus de justifier les causes des pressions, les ménages optent pour une gestion collective de la mangrove qui leur est indispensable. Les acteurs externes (MINEPDED, MINFOF, FAO, Mairies, ONG, Scientifiques) sont proposés pour encadrer et financer la logique de gestion communautaire qui s’oppose à la logique institutionnelle de gestion de l’environnement en général et de la mangrove en particulier.