Fighting AIDS in the neoliberal era : the example of the global fund in Niger
Lutter contre le sida à l'ère néolibérale : l'exemple du fonds mondial au Niger
Résumé
This thesis examines how international health policies are constructed. By examining the case of the fight against AIDS in Niger, i propose an analysis of their operational implementation in West Africa, the specific role of experts and the link between local, national and international dynamics in the construction of this public action. Since its creation in 2002, the Global Fund to Fight AIDS, Tuberculosis and Malaria has presented itself as a modern public-private partnership, a neutral and flexible funding instrument that respects national priorities. However, sociological observation shows that it is also a producer of standards and instruments that shape health governance, and that it contributes in particular to disseminating the principles of New Public Management, illustrating the rise, in the world of health aid, of practices, techniques, representations and values that are directly inspired by private management and the world of finance. The first part deals with the Global Fund as an organisation (its history, governance and operating methods). Subject to the growing demands of donors and the influences of players such as the Gates Foundation, the secretariat teams are constantly seeking to make the system more efficient, more effective and more transparent, at the cost of an almost constant renewal of its operating methods. The whole institutional set up is structured around a number of management imperatives that lead to intense normative and bureaucratic production: the imperative of transparency, the imperative of 'money for value' and risk management. The second part highlights the gradual construction of a new communitý of practices, which the complexity and constant reinvention of procedures have placed at the heart of the system: the 'Global Fund experts', with its own rules, recruitment logics, player strategies, internal power relations, but also its closing effects in relation to other fields of expertise in the field of health. The thesis proposes a critical mapping of this ecosystem and shows how this new field of expertise has been structured, with its co-optation logics, its transnational/geopolitical issues, its figureheads, its areas of specialitý, its internal clans, but also its gathering places, and its sense of belonging. The third part looks at the local repercussions of this set-up and shows the ways in which the Global Fund's managerial standards are being disseminated in Niger, via tools, procedures and instruments. Over and abovè the opening up of discussions to new players in the fight against AIDS, the most striking effects highlighted by the thesis are the changes in power relations on the national scene: questioning of the authoritý of the state, strengthening of the place of international players, creation of autonomous enclaves within the administration, weakening of social mobilisations, to the detriment of 'subcontracting' logics, contributing to a form of standardisation and depoliticisation of the fight against AIDS.
Cette thèse étudie les ressorts de la construction des politiques internationales de santé. En interrogeant le cas de la lutte contre le sida au Niger, je propose une analyse de leur mise en œuvre opérationnelle en Afrique de l’Ouest, du rôle spécifique des experts et de l’articulation de dynamiques locales, nationales et internationales dans la construction de cette action publique. Depuis sa création en 2002, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme se présente comme un partenariat public-privé moderne, un instrument de financement neutre, souple, respectueux des priorités nationales. Pourtant, l’observation sociologique montre qu’il est aussi un producteur de normes et d’instruments qui façonnent la gouvernance sanitaire et, et qu’il contribue notamment à diffuser les principes du New Public Management, illustrant la montée en puissance, dans le monde de l’aide en santé, de pratiques, de techniques, de représentations et de valeurs qui sont directement inspirées par le management privé et le monde de la finance. La première partie porte sur le Fonds mondial comme organisation (son histoire, sa gouvernance, ses modalités de fonctionnement). Soumises aux exigences croissantes des bailleurs et aux influences d’acteurs comme la Fondation Gates, les équipes du secrétariat recherchent en permanence à rendre le dispositif plus performant, plus efficace, plus transparent, au prix d’un renouvellement quasi permanent de ses modalités de fonctionnement. L’ensemble de ce dispositif institutionnel est structuré autour de plusieurs impératifs gestionnaires entrainant une intense production normative et bureaucratique : l’impératif de transparence, l’impératif d’efficience « money for value » et la gestion des risques. La deuxième partie met en lumière la construction progressive d’une nouvelle communauté de pratiques, que la complexité et la réinvention permanente des procédures ont placé au cœur du dispositif : les «experts du Fonds mondial», avec ses règles propres, ses logiques de recrutement, ses stratégies d’acteurs, ses rapports de forces internes, mais aussi ses effets de clôture par rapport à d’autres champs d’expertise dans le domaine de la santé. La thèse propose une cartographie critique de cet écosystème et montre de quelle manière ce nouveau champ d’expertise s’est structuré avec ses logiques de cooptation, ses enjeux transnationaux / géopolitiques, ses figures de proue, ses domaines de spécialité́, ses clans internes, mais aussi ses lieux de regroupement, et son sentiment d’appartenance. La troisième partie porte sur les répercussions locales de ce dispositif et montre de quelles façons les normes managériales du Fonds mondial se diffusent au Niger, via des outils, des procédures, des instruments. Au-delà de l’ouverture des discussions à de nouveaux acteurs de la lutte contre le sida, les effets les plus marquants que la thèse met en lumière sont la modification des relations de pouvoir sur la scène nationale : remise en question de l’autorité de l’État, renforcement de la place des acteurs internationaux, création d’enclaves autonomes au sein de l’administration, affaiblissement des mobilisations sociales, au détriment de logiques de « sous-traitance », contribuant à une forme de standardisation et de dépolitisation de la lutte contre le sida.
Origine | Version validée par le jury (STAR) |
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