Les populations de grands carnivores se sont reconstituées et ont recolonisé plusieurs régions au cours des dernières décennies. Cependant, leur comportement prédateur entraîne souvent des conflits avec l'homme, ce qui se traduit par l'abattage préventif ou en représailles des grands carnivores. La persécution directe et d'autres perturbations anthropogéniques rendent la conservation et la gestion des grands carnivores dans les paysages dominés par l'homme particulièrement difficiles. L'objectif principal de cette thèse est d'étudier l'impact des facteurs anthropogéniques sur la persistance des grands carnivores dans les paysages dominés par l'homme. Parmi tous les grands carnivores, les loups (Canis lupus) sont remarquablement résistants et capables de s'adapter à diverses conditions d'habitat. Les études évaluant la manière dont les facteurs anthropogéniques ou environnementaux affectent la persistance des loups et le nombre d'individus, ainsi que la compréhension de la dynamique et de la démographie des populations de loups, font défaut dans les paysages dominés par l'homme. Basée sur un suivi à long terme des loups dans les paysages ibériques dominés par l'homme, cette thèse estime la répartition spatiale des loups et identifie les zones potentielles de recolonisation ; évalue les caractéristiques des sites de reproduction et identifie les facteurs influençant le nombre d'individus dans les meutes ; et aborde le statut et la viabilité d'une population en évaluant sa dynamique spatio-temporelle, ses paramètres démographiques, et ses probabilités d'extinction.Selon le modèle d'occupation dynamique développé, la probabilité de colonisation des loups était positivement associée à l'altitude, à la densité du bétail et à la densité des routes non asphaltées, et négativement à la proportion de zones brûlées et à la densité des routes nationales-régionales et locales. De manière cohérente, la probabilité d'extinction diminue avec l'augmentation de la densité des routes non asphaltées. En évaluant la dynamique de l'aire de répartition du loup au cours des vingt dernières années en Ibérie, nous avons constaté que les probabilités d'occupation et de colonisation étaient plus élevées dans les zones où les loups ont persisté ou se sont étendus que dans les zones où ils se sont éteints ou à la périphérie de l'aire de répartition de l'espèce. Cependant, les fronts d'expansion inattendus et les stagnations observées au cours des vingt dernières années soulignent l'effet possible des facteurs sociaux liés à l’homme sur le rétablissement des populations de loups et la nécéssité d’evaluer ces facteurs. Sur la base des probabilités de colonisation et d'occupation, une carte d'adéquation de l'habitat a été élaborée, dans laquelle sont identifiées les zones prioritaires pour la mise en œuvre d'actions de conservation et de mesures d'atténuation. En évaluant les caractéristiques autour des sites de reproduction (zones tampons de 1, 2 et 5 km) et les variations du nombre de loups, nous montrons que la disponibilité des refuges influence positivement le nombre d'adultes à toutes les tailles de zones tampons. La densité de la population humaine, la densité des routes asphaltées, la proportion de zones brûlées, la rugosité et la densité des meutes influencent négativement le nombre d'adultes, en particulier dans les zones tampons les plus petites. Bien que les résultats indiquent qu'une plus grande disponibilité de refuges et une plus faible densité de routes non asphaltées augmentent le nombre de jeunes, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour évaluer les facteurs qui influencent le nombre de jeunes. Cette étude révèle l'importance des zones avec suffisamment de refuges et peu de perturbations humaines pour le nombre d’individus, en particulier sur les sites de reproduction, car les loups peuvent être particulièrement exposés et sensibles pendant la saison de reproduction.